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11 mai 2020
Le COVID-19 : d’abord une expérience traumatisante
Les informations quotidiennes relayées par tous les médias au sujet du COVID-19, ont contribué à créer un traumatisme chez beaucoup d’entre nous, traumatisme dont les stigmates risquent apparaître au grand jour dans les mois à venir, et ils seront certainement plus psychologiques que physiques pour la plupart d’entre-nous, sans compter les problèmes économiques qui ne feront que les alimenter davantage.
Notre propos ici n’est cependant pas de faire la liste de toutes les conséquences négatives à venir, en lien avec le COVID-19, mais au contraire de tourner notre regard vers le versant positif du virus, si tant est que nous en ayons la volonté.
Accepter de regarder l’autre versant du phénomène
Parmi les bénéfices immédiats, on peut aisément constater l’impact positif sur l’environnement : moins de pollution, retour en force de la faune et la flore là où elle avait disparu, etc…
Mais là encore, ce n’est pas sur ce volet que je veux porter mon regard. Ce qui me semble plus important, c’est de voir l’impact que peut avoir le COVID-19 sur nos comportements et sur la manière de penser et de réfléchir sur notre condition humaine.
Depuis des décennies maintenant, dans nos économies développées, nous n’avons cessé d’améliorer nos conditions d’existence, ce qui fait que, même si nous comptons encore trop de pauvres dans notre pays, force est de constater que les conditions de vie matérielles se sont considérablement améliorées pour la grande majorité d’entre nous.
Le développement de la société de consommation en lien avec l’augmentation du pouvoir d’achat n’a fait que renforcer le sentiment de toute puissance chez chacun d’entre nous, en même temps que l’égocentrisme qui l’accompagne. Ainsi, petit à petit, chacun dans son “petit royaume”, s’est senti de plus en plus puissant.
Parallèlement, l’évolution d’internet a permis d’avoir facilement accès à l’information, au sens large du terme, contribuant à faire de chacun d’entre nous des sachants. À partir de là, plus besoin des élites puisque la connaissance est à la portée de tout le monde, ces derniers devenant même de plus en plus suspects, au point d’être stigmatisés, puis rejetés.
Et voilà comment progressivement avec l’aide des réseaux sociaux, chacun a pu prendre la parole et asséner ses vérités, en confondant bien souvent ses convictions et ses croyances avec la réalité objective, car étayer ses idées avec des faits vérifiés, circonstanciés et incontestables, est souvent bien trop exigeant pour qu’on s’en donne la peine. Ceci est d’autant plus vrai qu’avec l’évolution de nos connaissances scientifiques et la mondialisation de l’économie, nous sommes de plus en plus confrontés à la complexité.
Se confronter à la complexité demande du courage et de l’humilité et ce sont certainement des qualités qu’il est difficile de cultiver dans la durée. Nous sommes donc de plus en plus enclins à composer avec la réalité objective, au risque de la déformer sensiblement, surtout si nous manquons d’informations, car une chose nous est devenue de plus en plus insupportable : ne pas savoir !
Ainsi, dans un monde où on a cultivé petit à petit le sentiment de toute puissance, il nous est difficile d’accepter de ne pas savoir ; et c’est là qu’arrive notre COVID-19 !
Et bien oui, il nous met devant le défi de comprendre comment il fonctionne ! Au début, devant l’ampleur de la pandémie, force est de constater qu’on ne sait pas, mais très vite les hypothèses fusent de partout, et devant les divergences de points de vue, en même temps que face aux constats des fausses pistes, on a du mal à accepter l’évidence : personne ne sait vraiment comment ce virus fonctionne et comment l’arrêter.
Le consensus qui prévalait au début du confinement s’effrite rapidement et sans compter les stratégies politiques qui peuvent émerger ça et là, on a du mal à accepter qu’on ne comprenne pas plus de choses sur ce virus à ce jour.
Des enseignements pour chacun d’entre nous !
Pour ma part, je remercie les scientifiques et les gouvernants qui nous rappellent chaque jour qu’ils ne savent pas et nous apprennent ainsi à, nous aussi, à accepter de ne pas savoir.
Donc, premier apprentissage avec le COVID-19 : ACCEPTER DE NE PAS SAVOIR ! Ceci implique par voie de conséquence, d’également SAVOIR DOUTER et enfin D’ACCEPTER DE SE TROMPER, et ce sont là les bases de la démarche scientifique.
De ce premier enseignement qu’il est fondamental de renforcer autour de nous, en découle un deuxième, celui de se confronter à notre VULNÉRABILITÉ.
Cultiver la force et l’illusion de la toute-puissance est vraiment dans l’air du temps, au point d’en devenir caricatural et ridicule avec notre Donald TRUMP, qui, en voulant nous faire boire de l’eau de Javel, pense nous sauver et devancer ainsi les scientifiques qui l’entourent !
C’est l’illustration caricaturale de la confusion entre nos croyances et la vérité, mais reste révélateur de la manière de penser chez beaucoup de dirigeants dans le monde, animés par leur volonté de puissance !
Aussi, tout comme c’est le cas pour ce qui concerne nos connaissances (et surtout notre ignorance), le COVID-19 nous rappelle que nous sommes vulnérables et nous ramène ainsi à notre condition humaine. Effectivement, en nous renvoyant chacun à notre vulnérabilité, il nous renvoie en même temps à notre humanité et par voie de conséquence, nous rapproche et nous rend plus solidaires.
En effet, si nous admirons l’autre pour sa force, nous l’aimons pour sa vulnérabilité. C’est bien la vulnérabilité qui constitue la clé de nos relations et on pourrait même dire, la force de nos relations. C’est parce que le COVID-19 nous rappelle que nous sommes vulnérables qu’il nous rapproche et que tous les soirs nous nous retrouvons pour frapper dans nos mains à l’unisson en chantant et en trinquant à nos soignants que nous vénérons comme des sauveurs !
Ainsi, selon la formule consacrée, le COVID-19 permet de “remettre l’église au centre du village” en nous rappelant que nous sommes d’abord ignorants et vulnérables, et c’est pour ça que nous avons besoin les uns des autres et que la bienveillance paie toujours plus que la volonté de dominer par la toute-puissance.
J’espère que cet épisode permettra au plus grand nombre de tirer ses enseignements ; je vous accorde qu’on est en droit d’en douter (surtout en regardant Trump, Johnson, Poutine, Erdogan, Xi Jinping et j’en passe…), mais c’est à nous de contribuer à notre niveau, à ce qu’il en soit ainsi !
Alain FUSILLER